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Algérie : à Bejaia, les manifestants cassent les urnes et ferment les bureaux de vote

À travers toute l’Algérie, les manifestants du « hirak » avaient d’ores et déjà annoncé le boycott de la présidentielle. À Béjaïa, en Kabylie, les contestataires sont également parvenus à empêcher l’ouverture des bureaux de vote. « Je ne douzedouzerai pas ! » est, depuis quelques jours, un cri de ralliement en Algérie, en référence au refus de voter pour la présidentielle, le 12 décembre (12/12).


Des tentes ont également été dressées pour permettre aux manifestants de passer la nuit dans la rue :

Photo prise par Hakim Abdelfettah.

À Béjaïa, à 220 kilomètres à l’est d’Alger, la mobilisation n’a pas cessé depuis la veille du scrutin. Durant toute la journée, mercredi 11 décembre, les rues étaient noires de monde pour dire non au vote, au cri national de « Pas d’élection avec les bandits ! ». La nuit tombée, la manifestation s’est transformée en un sit-in, avec musique et ambiance de kermesse :

La mobilisation a continué jeudi : dès les premières heures, des vidéos ont circulé sur les réseaux sociaux, montrant des manifestants détruisant les urnes et éparpillant, tels des confettis, les bulletins dans les bureaux de vote.

« Le retrait des forces de police est une victoire symbolique »

Hakim Abdelfettah, enfant de la ville, est cinéaste. Il a pris part aux manifestations dès le mois de février et a accompagné le cortège qui a fermé les bureaux de vote le 12 décembre :

La fermeture de ces bureaux avait commencé il y a quelques jours : des opposants à l’élection ont soudé la porte d’une école, fermé une autre avec un cadenas, construit un mur de briques devant le portail de telle autre encore.

Pour le reste des bureaux, comme le lycée Avicenne ou l’école Ben Toumert, qui sont des écoles ou des lycées, nous avons entamé une tournée ce matin dès 6 heures pour les fermer un à un. Les urnes et les PV de vote ont été systématiquement détruits, pour éviter tout risque de fraude ou de bourrage d’urnes. Il est hors de question qu’on annonce des résultats de vote à Béjaïa, d’autant plus si c’est pour qu’ils soient fallacieux.

Tous les bureaux de vote de Béjaia ont été fermés, à l’exception d’un bureau qui se trouve à l’extérieur de la ville, car l’école se trouve en face d’une caserne militaire.

L’autre victoire symbolique – mais très importante – que nous avons obtenu, c’est le retrait des forces de police qui étaient mobilisées devant les centres de vote et qui sont parties. Les policiers avaient essayé de nous provoquer ou de nous intimider, en menaçant d’utiliser les bombes lacrymogènes. Mais devant une telle foule, ils se sont finalement rétractés.

C’est une victoire dont on est d’autant plus fiers que notre mobilisation était pacifique. Et les drapeaux amazighs [berbères, NDLR] étaient présents aux côtés des drapeaux algériens, pour signifier également qu’on n’était pas dupes des tentatives de division du pouvoir [plusieurs manifestants qui avaient brandi le drapeau berbère dans les manifestations ont été traduits en justice pour « atteinte à l’unité nationale », NDLR].


« Le prochain président n’aura aucune légitimité à nos yeux »

Il n’y a pas qu’à Béjaïa que les gens refusent de voter. Partout en Algérie, il y a des manifestations pour dénoncer cette mascarade aujourd’hui. Mais Béjaïa a une histoire dans l’organisation contre le pouvoir central. Nous avons toujours été une ville opposante [la ville compte en effet plusieurs organisations syndicales ou de gauche et a déjà connu nombre de grèves pour des revendications sociales et politiques durant les dernières années, NDLR]. D’ailleurs c’est simple : aucun des cinq candidats à la présidentielle n’a mis les pieds ici pendant la campagne électorale.

Ces élections nous provoquent encore plus, et nous poussent encore plus à continuer, car c’est une mascarade. Le vote aujourd’hui ce n’est qu’un dos d’âne sur la route de notre révolution. Pour nous, c’est un non-événement, car c’est tout le régime qui doit dégager. Le prochain président n’aura aucune légitimité à nos yeux.

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