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Covid-19 : après l’angoisse de l’isolement, la peur du déconfinement

Plus que la détresse psychologique liée au confinement et à l’enfermement, une étude révèle qu’une grande partie des Français appréhende l’après 11 mai. Angoisses profondes, peur de l’autre, craintes sur l’avenir… les perspectives de déconfinement sont sombres pour certains.

« J’ai peur de retourner à Paris », affirme Eugénie, 28 ans, consultante dans le secteur de la santé. Confinée en province, elle doit rentrer à Paris après le 11 mai pour effectuer son déménagement. « Je me sentirai moins en sécurité. J’ai du mal à imaginer la distanciation sociale dans les transports en commun », confie-t-elle à France 24. Alors que la date officielle du déconfinement en France approche, une partie de la population n’est pas prête à revenir à sa vie d’avant.

Si les décès quotidiens et les hospitalisations pour coronavirus continuaient de diminuer jeudi 7 mai, certains Français craignent malgré tout que l’ouverture des écoles, le retour au travail, la liberté de circulation et la reprise des commerces ne relancent la propagation du Covid-19. On peut s’attendre à ce que nombre d’entre eux continuent de se confiner volontairement.

L’AFP relaie le témoignage de Carole, 42 ans, nourrice en région parisienne. Cette mère d’un enfant en bas âge vit cloîtrée chez elle depuis le début du confinement, rongée par la peur. Elle est ainsi restée sans nourriture pendant deux semaines. « C’était pâtes et pâtes. L’essentiel était qu’il y ait du lait pour ma fille », raconte-t-elle.

Un confinement qu’elle compte prolonger au delà du 11 mai. « J’ai encore plus peur, car il y aura beaucoup plus de monde dans les rues », explique-t-elle et affirme avoir l’intention de consulter un psychologue pour l’aider à combattre cette peur.

« Nos psy travaillent sans relâche »

« On peut facilement imaginer des troubles phobiques majeurs, et certainement des dépressions » dans les semaines à venir, explique Antoine Zuber, psychiatre à Paris, également contacté par l’AFP.

Au-delà des troubles psychiatriques, une étude menée sur 10 000 volontaires a révélé l’ampleur de la détresse mentale des Français lors de la crise du Covid-19. « On a remarqué que plus de 30 % des personnes a vu son sommeil dégradé », explique Christian Clot, explorateur et chercheur, responsable de l’étude scientifique « Covadapt : Étude des impacts et adaptation face à la crise du COVID-19 », sur l’antenne de France 24. « Les traumas mentaux sont énormes : 40 % de la population a exprimé une détresse. »

Ces angoisses sont en grande partie liées à la peur de l’autre. « Les patients avec des affections autres que le Covid-19 n’osent pas venir nous voir », témoigne anonymement à France 24 une pédiatre hospitalière de la région Centre, zone pourtant moins touchée par l’épidémie. « En partie parce qu’ils ont peur d’engorger nos services, mais en partie aussi parce qu’ils ont peur de nous. J’ai dû me battre pour convaincre certaines mères de me laisser ausculter physiquement leur enfant », confie la praticienne. « Nos psy travaillent sans relâche au téléphone pour suivre les familles »

Elle se dit inquiète elle-même pour l’après-confinement : « Je crains les incivilités, les comportements pour soi et non pour les autres ». Elle donne l’exemple du port du masque. « Les gens n’ont pas intégré qu’il faut le porter pour protéger les autres. Ils pensent que c’est un geste d’autoprotection. »

Pour Christian Clot, le bouleversement des habitudes est une autre source d’angoisse. « Certaines personnes ont su mettre en place dans leur confinement un système fonctionnel. Se réorganiser pour en sortir est très difficile émotionnellement », explique-t-il. Il note toutefois que la principale source de stress reste « l’avenir ».

Les perspectives de perte de l’emploi et de baisses de la qualité de vie suscitent chez Eugénie des inquiétudes. « Mais aussi le monde du jour d’après : sera-t-il plus écologique ou plus irresponsable ? », se demande la consultante, favorable à la reprise du travail. Elle envisage désormais son futur loin des grandes villes. Son mari, lui, dit craindre pour nos relations sociales : « J’ai peur de la peur de l’autre. »

L’éventualité d’une seconde vague est dans toutes les bouches. Pour l’équipe derrière l’étude Covadapt, un reconfinement, tel qu’évoqué par le premier ministre Edouard Philippe jeudi, « serait une erreur ». Christian Clot évoque le besoin de « mettre en place les gestes, les tests et les protections suffisantes ».

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